RDC/Ambassade de Londres : comme un air de sérénité et de dignité retrouvées

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« De mémoire de fonctionnaire, je n’avais jamais connu un responsable aussi droit… J’avais fini par penser qu’il n’en existait pas dans notre pays », « L’ambassadeur Kikaya, c’est un Monsieur », « Nous avons retrouvé notre dignité d’hommes et la fierté de servir, enfin, notre pays »… Nommé il y a cinq mois, l’ambassadeur Kikaya Bin Karubi semble faire l’unanimité chez le personnel diplomatique volubile en propos dithyrambiques. Il y a onze mois, les mêmes fonctionnaires squattaient l’ambassade avec leurs familles, leurs meubles, matelas, réfrigérateurs, réchauds, téléviseurs… Les locaux étaient crasseux, le moral des troupes dans les chaussettes et beaucoup de ressentiments envers l’ancienne ambassadrice.
Lorsque je me présente à l’ambassade ce lundi 1er février 2010, l’ambassadeur est en réunion en dehors de Londres. La dame qui me reçoit me fait patienter et revient avec une interrogation surprenante : « Je viens de téléphoner à l’ambassadeur, il voudrait savoir si votre reportage est payant ou gratuit ? ». J’ai envie d’éclater de rire mais cette question cache une réalité qui ne m’amuse pas. Les journalistes congolais sont réputés pour monnayer leurs productions ou de travailler sur commande. Passée cette formalité, je suis frappé par la métamorphose entamée depuis cinq mois, la façade de l’ambassade vitrée est couverte par un film grâce auquel on ne voit rien de l’extérieur. Une caméra surplombe la porte d’entrée et l’ouverture se fait à distance depuis les guichets. L’accueil a été complètement refait : parquet en bois, mobilier neuf et confortable, les guichets « dignes » d’une ambassade… Du classique, du banal, en effet, mais pas pour cette ambassade qui était une horreur il y a peu (cliquez ici). La normalité est devenue ici exceptionnelle après une gestion précédente des plus catastrophiques.

Les guichets, les bureaux, les couloirs et escaliers de l’ambassade sont dans un état impeccable. Pas que. Kikaya Bin Karubi n’a pas réhabilité que les locaux mais également des hommes qui le témoignent avec emphase : « En cinq mois et rien qu’avec les recettes de l’ambassade, il a réhabilité les locaux, acheté deux véhicules officiels et les salaires y compris les primes des diplomates sont versés régulièrement et leurs loyers payés sans que les diplomates passent à son bureau d’abord pour faire des salamalek… ». Contrairement à ce qui se passe habituellement dans nos ambassades, Kikaya a fait confiance au personnel trouvé sur place et n’a procédé à aucune nomination, ni permutation parmi le personnel : « Il a décidé de nous observer pendant plusieurs mois avant, éventuellement, de procéder à une redistribution des tâches », ajoute un diplomate pas gêné d’assaisonner le tout des superlatifs : « C’est un patriote, un nationaliste, un vrai ».

Sérénité contagieuse et fierté

Ce climat de sérénité déteint, naturellement, sur l’accueil du public. Au guichet une dame remplit une demande de visa mais s’obstine à ne pas remplir la case prévue à la personne censée l’accueillir à Kinshasa. Là où dans certaines ambassades on l’aurait rabrouée, la dame d’un certain âge qui est au guichet fait dans la douceur : « Pardon mama, remplir kaka mpo boye tokoki kosala eloko te, pardon mama na ngai » (Je vous en prie Madame, veuillez remplir sinon nous ne pourrions traiter votre demande, je vous en prie). L’intéressée, genre butée et vindicative, s’y plia presque gênée.

Au-delà de ces considérations internes, pour convaincre l’opinion de la réalité de la marche en avant de l’ambassade, les diplomates congolais soulignent la dignité et la fierté retrouvées aux yeux de leurs pairs : « Avec nos deux véhicules officiels admis dans des enceintes officielles, fini le temps où un taxi ou un véhicule privé nous amenait à des réunions et nous déposait devant le portail ». La RDC est devenue membre de la chambre de commerce de Londres, ce qui lui donne accès à un répertoire des acteurs importants qui pourraient investir au pays. Autre motif de fierté, c’est la RDC qui préside les réunions des ambassades des pays de la Sadc. Il reste, malgré tout, que l’ambassade est logée dans un environnement immobilier qui ternit, malgré tout, son prestige. Peut-être que d’ici là, Joseph Kabila aura décidé enfin de faire arrêter ceux qui s’étaient enrichis lors de la vente de l’ancien immeuble de l’ambassade pour qu’ils remboursent l’État congolais dans la perspective d’achat d’un nouvel immeuble de standing acceptable.|Botowamungu Kalome (AEM), Envoyé spécial à Londres, UK

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