Iblo Sax à AEM : «Les vacarmes ont envahi notre musique»

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Ngewanzola Nkiambi dit Iblo Sax est un des talentueux saxophonistes qui a fait les beaux jours de beaucoup de grands orchestres congolais de deux rives. Le grand public le connaît moins. Revue des grands moments de sa carrière ainsi que son regard sur l’évolution de la musique congolaise.

AFRIQU’ÉCHOS MAGAZINE(AEM): Difficile d’être connu si on brouille déjà soi-même son état civil ?

IBLO SAX: (Rires) Mon nom est Ngewanzola Nkiambi dit Iblo Sax, pour les intimes. Saxophoniste/ auteur-compositeur. Je suis né à Belingo à Oshwé dans la Province de Bandundu le 27 mars 1958 mais à la place j’ai mis Kisantu au Bas Congo. Au moment où je devais accéder aux études secondaires comme je ne pouvais pas rentrer là-bas pour obtenir mon acte de naissance, voilà comment mon lieu de naissance est devenu Oshwé.

AEM: Comment arrivez-vous dans la musique ?

IBLO SAX: Je suis né dans une famille des choristes. À la maison, mon père et mon frère Lazare jouaient de l’accordéon, mes frères et sœurs chantaient. Mais ma carrière, je l’ai commencée à Kisantu où j’étais étudiant à EPOMC, nous étions des fans de l’orchestre TP Zembe Zembe. Lors de la création de l’orchestre Tout Choc Banita, par le Patron Macky (Nganda Empire). C’est là où j’ai eu l’opportunité de côtoyer Vieux Nsimba Frijos. C’est lui qui m’a initié à cet Instrument, le saxo. De retour à Kinshasa, je me suis inscrit à l’Institut national des arts.

AEM: Mais ce n’est pas à Kinshasa que vous allez réellement commencer votre carrière?

IBLO SAX: Je suis retourné à Kisantu en 1974 pour les débuts de ma carrière professionnelle. Maman Nzuji wa Mbombo, Gouverneur du Bas Zaïre, me proposa d’aller avec le Groupe Mbengo Mbengo à Matadi avec Tapale Maringa. Je suis resté là jusqu’à 1976, après j’ai été sollicité par le Patron Nzimwaka à Boma avec la Grand Tam Tam. En 1977, je suis rentré à Kinshasa pour intégrer l’orchestre Lipua Lipua. Quelque temps après j’ai rejoint le Tsheke Tsheke Love de M’Pongo Love. En 1980, nous avons entamé notre périple européen. Au retour, j’ai traversé la rive droite du fleuve donc à Brazzaville. J’ai commencé d’abord avec les Rumbaya. Ensuite j’ai participé à la création de l’orchestre Kamikaze avec Youlou Mabiala. j’ai travaillé à ses côtés  jusqu’en 1986 où j’ai été sollicité par le Grand Maître Luambo Franco qui m’a remis 400.000 Francs cfa, pour intégrer le TP.OK Jazz.

AEM: Vous n’aviez cependant pas intégré son orchestre à ce moment là ?

IBLO SAX: Non, j’ai souhaité d’abord aller ajouter des notes dans une autre école, celle de la Rumba Fiesta, je suis allé frapper à la porte de l’Afrisa International de Rochereau Tabu Ley. Après quelques années, il fallait revenir avec force pour intégrer le TP. OK Jazz. Cette fois- ci, je suis allé à Limeté pour rencontrer le Grand Maître qui m’a accueilli avec respect. Voilà comment je suis resté fidèle à lui jusqu’à sa mort.

AEM: Jeune, quelles avaient été vos influences musicales ?

IBLO SAX: Mes idoles étaient Manu Dibango, Verckys Kimwngana et Empompo Loway. Manu Dibango m’avait inspiré avec sa chanson le Soir au village, c’est l’une de mes premières interprétations. Kiamuangana en deuxième position puisque avec son talent de l’école de la Rumba, le dauphin de Vieux Isaac Musekiwa. Quant à Empompo Loway; pour moi il reste une personne inoubliable. Il fut un maître et il m’a beaucoup corrigé et c’est lui qui m’a donné les secrets : comment improviser et rentrer au milieu des notes distinctes entre un guitariste et un Instrumentiste à vent. Il a beaucoup fait pour moi. Je lui suis très reconnaissant, j‘ai travaillé avec lui chez Mpongo Love et dans OK Jazz. Après les répétions chez Un Deux Trois, il me confiait son saxo pour aller sur la rue Bosobolo où je devais attendre jusqu’à son arrivée, à n’importe quelle heure, 21 heures ou plus. Et on recommençait à zéro pour comprendre ce qu’il souhaitait.

AEM: Avez-vous, à votre tour, formé d’autres saxophonistes ?

IBLO SAX: Oui, j’en ai formé beaucoup mais souvent ils abandonnent vite puisque le saxophone est un instrument qui demande beaucoup de patience, de la maitrise et des sacrifices. Travailler le soir, aux heures tardives de la nuit, les injures pour garder une position exacte, etc. Avec Empompo Loway, ce n’était pas facile.

AEM: Pourquoi ne trouve-t-on pas beaucoup de jeunes saxophonistes ?

IBLO SAX: Nos jeunes ont choisi la facilité (lelo lelo kaka mbongo, toujours mbongo), et pourtant ce sont eux qui ont besoin d’apprendre, besoin d’ajouter un plus dans leurs vies. C’est le malade qui doit consulter un docteur et non le contraire.

AEM: Quelles sont les chansons auxquelles vous avez participé ?

IBLO SAX: J’ai commencé à faire des enregistrements avec Lipwa Lipwa mais je ne m’en souviens plus. Monama avec M’Pongo Love, et tous les succès de l’orchestre Kamikaze c’est avec moi moi : Mbata, Toutou, Etabé Mofudé, 1×2=Mabé, Loufoulakari, Adele M’Bou, Maka, Ondongo, etc. Avec l’Afrisa; Sacramento, Nalapa, Mobali na ngai wana, Bref l’album Beyanga et tant d’autres dont les titres m’échappent. Dans le TP l’OK Jazz : Na kosamba samba te, Cœur artificiel, Loboko zoba, Eau bénite, Daty Pétrole,. Et après dans Bana OK Ofela presque tout ce que vous avez écouté puisque après moi il n’y avait plus rien jusqu’aujourd’hui. Pour le moment je suis le seul saxophoniste survivant de cette école de Rumba Odemba sur scène.

AEM: Comment jugez-vous le niveau actuel de la musique congolaise ?

IBLO SAX: Personnellement je ne critique personne concernent les vacarmes qui ont envahi notre musique, ce n’est pas mon genre, chacun fait ce qu’il veut; seulement il manque beaucoup de choses. Mon souhait est de rentrer au pays et de faire ce que je peux malgré moi. Il semble que les gens souhaitent le retour de l’OK Jazz comme Orchestre national où les artistes seraient des fonctionnaires. Si tel est le cas, c’est une bonne idée et nous attendons  un appel et voir la suite comment nous pourrions nous organiser, débattre ça pour trouver un compromis si c’est possible.

AEM: Le mot de la fin ?

IBLO SAX: Il n’y aura pas un mot de la fin, au contraire c’est le début d’un dialogue interminable, puisque le Congo, notre beau pays, est la source  d’inspiration de la culture. C’est le centre de la musique africaine qu’ont le veuille ou pas, donc il serait souhaitable que les Institutions changent leur façon de voir les choses. C’est dire que L’Etat congolais a un devoir vis à vis de la Nation et la jeunesse. Comme il a été souhaité par le Chef de l’Etat, qui est aussi la volonté de chacun d’entre nous, pour sauvegarder la dignité et notre fierté nationale dans le monde. Comment aider nos jeunesse et éviter qu’ils ne se retrouvent pas dans la rue. Il n’est jamais trop tard, hommes et femmes, enfants, jeunes et vieux, que tout le monde se réveille. Concentrons-nous pour prendre chaque chose au sérieux. Donc il faut créer des centres des formations pour donner la chance à la nouvelle génération.|Propos recueillis par  Herman Bangi Bayo (AEM)

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